Sonotone

Quatorze chansons pour trente minutes: l’ami Harvey s’attache un format ordinairement dévolu au punk pour cet album. Plus précisément, on pense à Wire et à leur habitude géniale, dans les premiers albums, d’adopter l’équation une idée = une chanson (et inversement, ce que le punk n’a pas toujours fait). Mais Harvey n’officie pas pour autant dans un genre très énervé. Il s’agit comme à son habitude d’un songwriting sombre, narratif (en trois actes), avec des récitatifs. On pense à Tom Waits (Summertime In New York), à Kurt Weil. Et à Nick Cave évidemment. L’ex-Bad Seed partage avec son ancien leader cette compétence incroyable: écrire des chansons simplissimes dans leur structure mais à la sincérité fondamentale. Difficile d’ailleurs de ne pas évoquer The Hammer Song pour les paroles et The Weeping Song pour la mélodie, en entendant God Made The Hammer. Ailleurs, Glorious fait très Harvey (mais PJ, cette fois); la très cinématique Midnight On The Ramparts pourrait figurer au générique de fin d’un film de Sergio Leone. I Wish That I Were Stone est viscéralement springsteenienne. On reste en excellente compagnie avec la superbe reprise d’Orbison Wild Hearts, ou celle de Van Morrisson The Way Young Lovers Do (sinistre et morbide, à la Murder Ballads). Un album très construit, dont The Story Of Love, au centre du deuxième acte, serait la piece de resistance (comme disent les américains). J’ai presque tout cité, comme quand tout est bien sur un disque.