Sonotone

Ben Watt, 51 ans, essentiellement connu comme moitié masculine du duo Everything But The Girl, est un être à l’humilité agaçante. Le genre de type qui sort un disque tous les trente ans (chiffre historiquement exact, puisque son seul autre album solo, North Marine Drive, date de 1983) et qui le reste du temps s’efface devant les artistes pour qui il travaille (Massive Attack, ou son label Buzzin’ Fly – entre autres). Il faut aussi mettre sur le compte de ces longs silences le syndrome immuno-déficient dont il souffre et qui lui occasionnent de fréquents séjours à l’hôpital. On peut donc comprendre qu’il manque de sûreté, qu’il s’excuse («I’m not as good as I used to be» sur Young Man’s Game). Il a beau être modeste, le problème, c’est que quand il s’y met, tous les autres peuvent aller se recoucher (sauf peut-être Bill Callahan et Kurt Wagner), parce que l’air de rien, officiant dans un genre folk-rock des plus arpentés, il tape dans le mille à chaque chanson. En ouverture, la splendide Hendra a un petit côté ballade de hardeux avec ses arpèges acoustiques (Don’t Cry, des Guns N’Roses, n’est pas loin). C’est la marque des grands songwriters folk que d’être capable de retrouver l’archétype derrière la composition, et c'est le cas de toutes ces chansons. Forget pourrait figurer telle quelle sur Harvest Moon (1992) de Neil Young ou The Trials Of Van Occupanther (2006) de Midlake. Golden Ratio chez Lambchop. Nathaniel chez Creedence Clearwater Revival, etc. La valeur attend peut-être chez Watt le nombre des années. Mais quand il demande «Can you name a great fighter over forty-nine?» sur Young Man’s Game, la réponse est simple. Oui.