La scène est ornée de dentelles vieillies, sur lesquelles se reflèteront plus tard des projections abstraites. Le sol est, lui, parsemé de petits luminaires en forme de flamme, qui palpiteront en rythme avec la musique. C'est dans ce décor quasi végétal, sous les ors du mythique Radio Music City Hall de New York, que Bon Iver prend la scène pour le dernier spectacle d'une résidence de cinq jours entièrement sold out. Il n'en faut pas plus pour créer une ambiance précieuse, un écrin intimiste, à même d'accueillir les compositions délicates de Justin Vernon, la tête pensante de cette formation du Wisconsin. Car si l'homme a pour habitude d'officier à peu près seul en studio, il est accompagné ce soir de huit autres musiciens - et d'une pléthore d'instruments. Deux batteries, une poignée de synthés, des guitares et quelques trompettes font partie de la panoplie déployée. Résultat, le son dépouillé de Bon Iver gagne en amplitude et les chansons se parent de couleurs inattendues. L'inaugural Perth prend des airs de kaléidoscope musical, tout comme le superbe Calgary. Seul Skinny Love, un titre fluet et hanté tiré du premier album, a droit à une interprétation moins touffue, Justin Vernon se retrouvant seul sur scène le temps d'une chanson. Reste à savoir si cette "nouvelle direction", pour reprendre les termes de l'artiste lui-même, sera de bonne augure. Le traitement tout en synthés, voix Barry White-esque et rythmiques funky réservé à Minnesota, WI et Beth/Rest, des titres qui avaient déjà suscité de la perplexité chez la plupart des chroniqueurs à la sortie de l'album, font regretter le son glacial à la beauté presque surréaliste de For Emma, Forever Ago. Heureusement, le concert se clôt sur une interprétation majestueuse de For Emma qui réduit ces doutes en poussière.