Sonotone

L’album commence par une lumineuse intro de cordes intitulée Huh?, et c’est l’animal que nous sommes qui, sortant d’une longue hibernation musicale, retrouve enfin la lumière. Encore ébloui, le coup de grâce lui parvient plus tôt qu’il ne le croyait, avec la passionnante et exténuante Hey Jane. Une chanson-phare qui va le guider à travers l’univers faussement simple (en réalité complètement tordu) de Jason Pierce. Au terme de ces 8:50 à la fois épiques («Show’em what you can do!») et abjectes (le leitmotiv «Hey Jane where you goin’ today» se transformant en un «Hey Jane when you gonna die?»), ladite Jane est passée du statut de petite fille à celui d’amante, et tout à la fois de Mère mythique, d’icône velveto-warholienne, de next-door-girl, de némésis, de sœur jumelle. Le tout sur fond de mélodie simple et fédératrice, taillée pour les stades. Difficile de dépasser ce sommet? C’est peu connaître les capacités de Peirce à toucher son auditeur en plein cœur, ce qui arrivera à maintes reprises par la suite, dans une collection de titres géniaux d’intemporalité. Un Too Late ressucitant les Delgados; un I Am What I Am qui revient aux influences blues-gospel de Ladies And Gentlemen We Are Floating In Space (1997); une Mary rassemblant dans une ferveur syncrétique larsens de guitare, saxophones et violons, ou la sublime prière enfantine de Life Is A Problem. Spiritualized est souvent considéré par ses fans en termes sacrés, et il y a de quoi. Il se confirme en 2012 que Jason Pierce a été investi du don de créer une musique tout simplement épiphanique.