Iceage
You're Nothing
Matador
Rock
01 - 03 - 13
par Gaspard Turin
Retour des petits génies danois du punk sans concessions, qui avec ce second album sortent très nettement du lot des milliers de productions bruitistes qui voient le jour ici et là, et auxquelles on ne peut guère que concéder fraîcheur et énergie. Deux qualités dont n’est pas dépourvu You’re Nothing – mais ce disque est bien plus que ça. Il concède à l’esprit punk quelque chose dont on ne lui avait jamais demandé de se départir: de vraies chansons, avec constructions (a-)rythmiques et riffs malins (Awake rappelle un peu Fucked Up; de manière inattendue la géniale In Haze fait nettement penser à New Model Army, qui ne furent pas les derniers quand il s’agit de monter un riff efficace; il y a un peu de Radiohead dans l’incroyable Everything Drifts). Même des titres les plus bordéliques (It Might Hit First), se dégage une structure, une réflexion. On flirte parfois avec Sonic Youth, période Daydream Nation. Quoique crachée en une minute et demie, une chanson d’Iceage n’est jamais le résultat d’une jam sur deux accords pendant une demi-répète. Enfin, la voix d’Elias Rønnenfeld est l’un des grands atouts du groupe, avec une réserve toutefois: dès qu’il appuie trop sur les syllabes, pensant peut-être imiter Johnny Rotten, il rappelle plutôt Pete Doherty bourré. Alors que son timbre naturel est tout simplement miraculeux. D’ailleurs les meilleurs titres sont ceux où il ne force pas les codes du genre en poussant la bouélée. Dans le même ordre d’idées, l’apparition d’un piano dans Morals, les roulements de batterie dans Burning Hands, amènent une dimension inattendue, alors que l’on reste toujours dans une densité, une tension maximales. Bref, une chance pour ceux que le punk hardcore n’a jamais intéressé de voir ce que certains peuvent en faire.