Sonotone

French Films

"On ne se dispute jamais au sujet de la musique qui passe dans le van"

par Vincent Bürgy

De la Finlande, on connaît surtout son froid, les portables Nokia et un amour immodéré pour les saunas. Pour le reste, on retient le coup d'éclat d'un groupe métal tapageur, Lordi, un soir du mois de mai 2006, lors du concours de l'Eurovision. Mais ces poncifs, les jeunes Finlandais n'en ont cure. La preuve avec l'apparition – ou du moins l'affirmation – d'une nouvelle scène musicale au pays du Père Noël. Aux cartons, les chansons folk étranglées de Lau Nau ou la déprime gothique de HIM, place aux jolis minois du trio Le Corps Mince de Françoise et aux costards new wave de French Films. Les cinq garçons se sont d'ailleurs produits le mardi 20 décembre, sur la scène de la salle Fri-son, à Fribourg.

 

Enfoncé dans les fauteuils de leur loge, clopes au bec, Antti, Santtu, Mikael et Joni (Johannes, chanteur et guitariste, est absent de l'interview, en raison d'un oubli à l'hôtel) affichent une moyenne de vingt printemps et l'insouciance qui va avec. Sous leurs airs de dandys, les compères subissent pourtant les accrocs du quotidien, entre la tournée marathon aux quatre coins du continent et la difficulté de joindre les deux bouts. "On ne vit que de cela, c'est pas facile", soupire Joni, le guitariste. Une petite heure plus tard, instruments en mains, les compères ont pourtant vite fait de chasser la grisaille et les mauvais sentiments. Avec French Films, on roule en terrain connu et presque sur les plates-bandes de The Drums. Des similitudes qui pourraient jouer des tours à bien des néophytes. De leur univers fait de synth pop, de new wave ou de surf rock, les Finlandais se distinguent par un style direct, un rock juvénile et estival, sans temps mort, qui rompt avec les frimas scandinaves. La formation a posé sa première banderille en novembre 2010, avec un EP de quatre titres. Et, déjà une idée: ce groupe a «quelque chose». Confirmation un an plus tard, avec Imaginary Future, disque canon d'une petite trentaine de minutes. Bien trop court, mais d'une cohérence et d'une efficacité totale. Les cinq jeunes ne mâchent par leur musique, ni leurs références. La preuve avec une interview blind test, réussie haut la main.

Premier extrait: Yann Tiersen - La Valse d'Amélie

Joni (guitare): Yann Tiersen… Amélie Poulain. C'est un bon film avec une chouette bande-son. Je crois que la première fois que je l'ai vu, j'avais à peu près quinze ans. Je l'ai loué sur les conseils d'une amie qui me l'avait recommandé parce qu'il met vraiment de bonne humeur. Il y a toute une histoire derrière notre nom de groupe, mais pour faire court, on trouvait vraiment que ça sonnait bien. On n'a pas fait appe à un générateur de nom, c'est juste venu comme ça. Et niveau cinéma, on a pas de préférences, tous les genres nous plaisent, cela n'a rien à voir avec le pays. Je parle un petit peu français, car j'écoute des artistes français, ma préférée est d'ailleurs Françoise Hardy. Mais j'aime aussi Jacques Dutronc./p>

Deuxième extrait: Le Corps Mince De Françoise - Take Me To The Mountains

Joni: On a joué avec elles, il y a deux jours! Santtu (synthés): Ce sont des filles géniales. Mikael (basse): Nous les connaissions déjà avant ce concert et même avant qu'elles commencent à se produire en groupe car elles viennent d'Helsinki. Nous avons beaucoup d'amis en commun. Joni: Mais on ne peu pas dire qu'il y ait une véritable scène musicale à Helsinki. Il y a juste quelques petits cercles au niveau de la Finlande, rien de comparable à Londres par exemple.

Troisième extrait: The Drums - Let's Go Surfing

Joni: Tiens donc, mais qu'est-ce que c'est? (rires). Nous avons partagé la scène avec eux au festival Sonic Visions, au Luxembourg. Ils étaient les headliners et ils ont joué juste après nous. Quand nous avons formé French Films, nous n'avions jamais écouté ce groupe. Nous ne sommes pas fan des Drums. Je ne sais pas pourquoi les gens nous comparent continuellement à eux. Mais il y a peut-être des liens que nous ne voyons pas... Mikael: Les similitudes peuvent venir du fait que nous partageons une passion pour le label anglais Sarah Records, qui hébergeait notamment Another Sunny Day ou The Field Mice. Joni: Personnellement, j'aime bien leur EP, Summertime, et leur second album, Portamento. Leur premier disque, c'est pas ma tasse de thé. Santtu: Leur musique est vraiment très catchy et très bien produite.

Quatrième extrait: Vampire Weekend - Oxford Comma

Santtu: Ce n'est pas une influence, mais un groupe qu'on a aimé, pas adoré, juste aimé. Je ne connais pas tout de leurs albums, mais j'aime beaucoup le peu que j'ai pu entendre.

Cinquième extrait: Orchestral Manœuvres in the Dark – Electricity

Mikael: C'est un groupe que l'on écoute souvent en tournée, même si on a des goûts très variés. J'ai presque uniquement de la musique électronique sur mon laptop car je n'ai pas de lecteur CD sur mon ordinateur. C'est Joni, qui possède l'intégrale de The Jesus And Mary Chain. Santtu: Dans le van, il nous arrive aussi d'écouter de la musique traditionnelle africaine ou bolivienne, mais aussi de la pop, du punk. Antti (batterie): Chacun a ses groupes préférés, mais tout le monde a l'occasion de partager sa musique. On ne se dispute jamais au sujet de la musique qui passe dans le van.

Septième extrait: The Cure - Lullaby 

Joni: L'album Disintegration, qui contient ce titre, est un disque incontournable à mes yeux. Je l'ai acheté à 13 ans et depuis, à chaque automne, je me le passe en boucle. C'est la meilleure «musique d'automne» qui soit. Mikael: De toutes les comparaisons qui peuvent être faite avec notre musique, je pense que c'est la plus juste. On est tous fan. Joni: Il nous manque juste la coupe de cheveux à la Robert Smith. Plus jeune j'ai d'ailleurs essayé de lui ressembler.

Huitième extrait: Gary Numan - Cars 

Santtu: Je connais ça… Cars? C'est Gary Numan. Il me semble que cela date de 1978, c'est pas tout récent, mais le clip est très bien.

 

Cette interview a été réalisée en collaboration avec Tea Zine

Photos Nicolas Boche

 

 

 

 

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