Sonotone

Bill Callahan

Le Romandie


09.11.2011

par Sarah Lombardi

Vêtu d'un jeans et d'une chemise, Bill Callahan entre sur scène, sa guitare accoustique en bandoulière. Son nom à lui seul évoque des histoires de chevauchées sauvages dans le Middle-West américain – il est né à Silver Spring, dans le Maryland. Accompagné de deux excellents musiciens, un guitariste et un batteur, et sans un mot d'introduction, il entame Riding For The Feeling, tiré de son dernier album, Apocalypse. A l'instant même où il commence à chanter, le décor est posé: on est transporté dans une vallée verdoyante. Sa voix est grave et profonde, le son est précis, et chaque mot qu'il articule claque comme des volets au vent. Ici, pas besoin de visuels en arrière-plan, les images se succèdent instantanément dans notre imagination. Puis, il enchaîne avec Baby's Breath, tout aussi puissant. Si ses morceaux sont généralement longs, en live, il les étire dans des versions qui frôlent parfois les dix minutes. On a le souffle coupé. Suit Too Many Birds issu de son album de 2009, Sometimes I Wish We Were An Eagle, avant un retour au présent avec America!, tout aussi long et stupéfiant: la batterie, entêtante, alterne avec la guitare et ses solos.

Les trois musiciens sont très complices et se complètent parfaitement, ce qui leur permet de se laisser mutuellement de la place. Et la voix, au premier plan, constitue le liant. Drover nous emporte lui aussi très loin. S'il n'y a ici pas de flûte ou de violon, comme sur le disque, les trois instruments sont exploités à merveille et la mélodie fonctionne sans autre fioriture. Se succéderont encore In The Pines (une chanson traditionnelle du répertoire folk américain, reprise par de nombreux artistes dont Nirvana), qui figure sur son album live Rough Travel For A Rare Thing (2010), avec la guitare électrique en guise de vent soufflant entre les pins; Free's, un titre plus léger où le chanteur sifflote, ainsi que Universal Applicant. Sur ce dernier, la guitare électrique joue de manière obsessionnelle quelques notes constituant l'arrière fond sonore sur lequel le chanteur pose ses paroles avec subtilité. Durant une heure et demie de concert où l'intensité est maintenue du début à la fin tel un fil tendu, Callahan ne s'autorisera que quelques mots pour dire son plaisir de jouer à Lausanne, en Suisse, un pays où il a encore quelques dettes à régler! A la suite d'un long rappel, il revient pour interpréter des titres plus anciens dont Bathysphere. Comme toute bonne chose a une fin, le concert s'achève, nous laissant littéralement sonnés. Si mon corps est toujours là, mon esprit, lui, vole quelque part dans le ciel, entre les plaines et les rivières ondulantes du Maryland, libre et léger comme un oiseau… Même si, ayant oublié que le parking ferme à minuit, il m'a fallu attendre (heureusement, en compagnie de quelques autres sympathiques étourdis) la venue de l'agent de sécurité, quarante-cinq minutes plus tard!

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